Face à la précarité du squat « 5 étoiles », nous interpellons le préfet du Nord

Suite à l’évacuation du squat de la gare Saint-Sauveur de Lille en octobre 2017, c’est au 25 rue Jean Jaurès que se sont retrouvées les personnes déplacées de force, y mettant en place un nouveau squat appelé « 5 étoiles ». Elles sont aujourd’hui environ 200 à y vivre, malgré les conditions de vie insalubres et précaires que le local, ancien entrepôt DTN, leur offre.

En effet, comme le précise un rapport de la Cimade d’octobre 2018, les lieux ne sont absolument pas adaptés pour l’accueil de personnes, qui sont la plupart du temps en situation personnelle de détresse et dont environ un tiers sont des mineurs non accompagnés.

L’approche de la fin de la trêve hivernale le 31 mars prochain rend la situation d’autant plus alarmante, puisqu’avec elle s’annonce le risque d’expulsion de ces personnes. La préfecture, ne prenant pas ses responsabilités, dirige régulièrement les personnes migrantes qui sollicitent ses services vers le squat. Elle manque ainsi au devoir de l’Etat qui ne leur offre aucune autre solution que la rue, ce qui est indigne de notre pays.

J’ai donc signé, aux côtés d’autres élus, de partis politiques et d’ssociations humanitaires, cette lettre adressée au préfet du Nord. Nous lui demandons les mesures qu’il compte prendre pour mettre fin à cette situation préoccupante et pour prendre en charge dignement les personnes qui vivent aujourd’hui au squat « 5 étoiles ».

Lettre au préfet

Préfecture du Nord
12, rue Jean Sans Peur
CS 20003 – 59039 Lille Cedex

A l’attention de M. Michel Lalande,
Préfet du Nord

Copie à :
Madame Martine Aubry, Maire de Lille
Monsieur Jean-René Lecerf, Président du Conseil départemental du Nord
Monsieur Max-André Pick, Président de Partenord Habitat
Monsieur Damien Castelain, Président de la MEL
Monsieur Emmanuel Richard, Directeur de la DDCS du Nord
Monsieur Sylvain Mathieu, Délégué interministériel pour l’hébergement et l’accès au logement
Mme Sophie Kapusciak, Directrice territoriale de l’OFII
Monsieur Daniel Barnier, Préfet délégué pour l’égalité des chances
Monsieur Jacques Toubon, Défenseur des droits

Lettre ouverte concernant la situation des habitants du squat situé 25 rue de Valenciennes

A Lille, le 19/03/19

Monsieur le Préfet

Nous revenons une nouvelle fois vers vous concernant la situation des personnes occupant les locaux du 25 rue de Valenciennes à Lille.

Environ 200 personnes, dont un tiers de mineurs non accompagnés en situation de grande vulnérabilité, continuent d’y vivre dans des conditions extrêmement précaires et indignes.

Si elles sont présentes dans ces lieux insalubres, ce n’est nullement par choix, mais parce que leurs appels au 115 ne débouchent que très rarement sur une proposition d’hébergement. En outre, contrairement à ce que votre représentant a pu avancer devant le Conseil d’Etat dans le cadre des recours que vous avez formulés contre les ordonnances du tribunal administratif de Lille du 16 novembre 2018 vous enjoignant à installer, avec la Ville de Lille, des toilettes et un point d’eau, les personnes présentes sur ce site n’ont nullement « les moyens de se tirer d’affaire eux-mêmes » (1).

Seuls les demandeurs d’asile en cours de procédure peuvent toucher une allocation pour demandeur d’asile (ADA) mais tous ne l’ont pas et son montant est bien trop faible pour permettre l’accès à un logement, rendu encore plus difficile par la précarité de leur situation administrative. Les autres, mineurs ou en situation administrative instable, ne bénéficient d’aucune aide financière (2).

La fin de la trêve hivernale approche et nous craignons l’expulsion prochaine des personnes présentes dans le bâtiment. Aussi, nous vous demandons quelle prise en charge vous avez prévue pour protéger ces personnes vulnérables et en détresse, et leur permettre d’accéder à leurs droits fondamentaux. La loi prévoit en effet le droit à l’hébergement pour toute personne en situation de détresse sociale, et un dispositif spécifique d’hébergement pour des personnes en demande d’asile. Le département devrait quant à lui mettre à l’abri les mineurs au titre de la protection de l’enfance.

Alors que les juges des référés du tribunal administratif de Lille vous ont enjoint à procéder à une évaluation sociale des situations en vue de rechercher une solution d‘orientation adaptée dans un délai de quinze jours, il ne nous semble pas qu’une telle action de diagnostic ait été réalisée.

Des recours DAHO (Droit à l’hébergement opposable) ont par ailleurs été déposés ces derniers mois par des habitants du squat et une soixantaine de personnes ont pu être reconnues prioritaires pour un hébergement par la commission de médiation. La plupart de ces personnes n’ont pas reçu de proposition d’hébergement stable et adapté dans le délai de 6 semaines. Si certaines personnes ont pu être hébergées dans le cadre de la veille saisonnière, elles risquent de se retrouver à la rue à compter du 1er avril et ce alors même que la loi prévoit un « droit au maintien » en hébergement (3). Elles n’auront alors pas d’autre alternative que d’aller rejoindre le bâtiment de la rue de Valenciennes, ou le prochain squat qui se créera si celui-ci est expulsé sans que de véritables solutions d’hébergement soient proposées.

Pour toutes ces raisons, nous sollicitons à nouveau l’organisation d’une réunion en urgence avec toutes les parties concernées.

Espérant recevoir une réponse favorable de votre part, nous vous prions de bien vouloir agréer, Monsieur le Préfet, l’expression de notre considération distinguée.

Premiers signataires :

APU Fives
APU Moulins
APU du Vieux Lille
Association La Cloche – Carillon de Lille
ATD Quart Monde Hauts-de-France
BANTA!
CASA – Coordination d’Actions Solidaires et d’Accompagnement
CNL 59
CSP59
Centre de la Réconciliation
Collectif des Olieux
Collectif des SDF de Lille
Collectif Solidarité Roms de Lille Métropole
Conseil Régional des Personnes Accueillies/Accompagnées des Hauts-de-France
La Cimade Nord Picardie
Ecole sans frontière
Entraide de l’Eglise Protestante Unie de Lille
Emmaüs Hauts-de-France
Fédération des Acteurs de la Solidarité Hauts-de-France
Fondation Abbé Pierre
Front Uni des Immigrations et des Quartiers Populaires (FUIQP)
Groupe de réflexion inter-religieux d’aide aux migrants (GRIAM)
INDECOSA-CGT 59
Ligue des droits de l’Homme de Lille
L’île de Solidarité
La Sauvegarde du Nord
Magdala Médecins Solidarité Lille
MRAP
La Pastorale des Migrants
RAIL
Secours Catholique Nord-Lille
Société de Saint-Vincent-de-Paul
Uriopss Hauts-de-France Nord Pas-de-Calais
Utopia 56 Wambrechies Entraide Réfugiés

Julie Gommeaux, avocate au Barreau de Lille, Présidente de la commission droit des étrangers
Emilie Dewaele, avocate au Barreau de Lille
Père Christian Berton, doyen de la ville de Lille et responsable du Conseil œcuménique
Pasteur Christian de la Roque, Eglise de « La Réconciliation »
Michel Ruef, diacre, Collectif Mémoire Fraternité
Clotilde Delbecque, Service Evangélique des Malades du Doyenné Adrien Quatennens, député de la première circonscription du Nord
Ugo Bernalicis, député de la seconde circonscription du Nord
Julien Poix, candidat France insoumise aux élections européennes
Julie Nicolas et Maroin Al Dandachi, porte-parole d’EELV Lille
Jérémie Crépel, président du groupe des élus EELV de la MEL
Stéphane Baly, président du groupe des élus EELV de Lille
Hugo Vandamme, secrétaire du PCF Lille
Laurence Perrault-Lefebvre, directrice du Centre d’Information et d’Orientation de Lille
Christine Carlier, secrétaire générale de l’UL CGT de Lille et Environs
France insoumise de Lille
UNEF Lille
Solidaire Étudiant·e·s Lille
SUD Santé Sociaux du Nord
People’s Health Movement Nord de France
Collectif le social déchaîné

  1. Propos repris par La Voix du Nord dans son édition du 11 janvier 2019
  2. 6.8€/jour pour notamment se nourrir et un complément de 7.4€/jour si aucune place d’hébergement n’est proposée. Soit pour une personne seule au total 426€/mois.
  3. Article L345-2-3 du CASF : « Toute personne accueillie dans une structure d’hébergement d’urgence doit pouvoir y bénéficier d’un accompagnement personnalisé et y demeurer, dès lors qu’elle le souhaite, jusqu’à ce qu’une orientation lui soit proposée. Cette orientation est effectuée vers une structure d’hébergement stable ou de soins, ou vers un logement, adaptés à sa situation. »

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