François Baroin fait payer les étudiants pour une crise qui n’est pas la leur !

Le ministre du Budget doit trouver 100 milliards d’économie sur 3 ans (40 milliards au budget 2011) afin de réduire le déficit et « rassurer les marchés ». Pour ce faire, il entend s’attaquer à certaines aides relatives au logement, aux services à domicile et à l’emploi. Et pourtant ce sont bien ces mêmes marchés qui ont accentué le déficit public et les voilà toujours indemnes. Tout est dit : il va falloir se serrer la ceinture pour payer leur crise !

Les étudiants seraient-ils des privilégiés ?

Les étudiants sont donc mis à contribution par monsieur Baroin alors qu’ils sont les plus en difficulté dans cette crise : pas de revenu, bourses trop faible, crise du logement, peu d’emplois disponibles, stages non-rémunérés, etc. Plutôt que de renforcer le service public, et notamment les Centres Régionaux des Œuvres Universitaires et Scolaires (CROUS) qui gèrent hébergement, restauration, aides sociales et culture, pour faire en sorte de sécuriser socialement les étudiants, Bercy fait le choix de donner moins aux étudiants. Il faudra choisir entre l’Aide Personnalisée au Logement (APL) et la demi-part fiscale pour enfant à charge.

Désormais il sera donc impossible de cumuler aide au logement et réduction d’impôts. Rappelons que lorsqu’un étudiant touche les aides au logement, sa famille doit renoncer aux prestations familiales pour lui. Mais pourquoi permettre le cumul de l’aide et de la demi-part? Tout simplement parce que cela ne recouvre pas la même réalité. L’aide au logement, comme son nom l’indique, sert à couvrir la charge de logement pour l’étudiant, qui doit justifier d’avoir un domicile propre. En revanche la demi-part fiscale pour un enfant à charge ne concerne pas que le logement. La charge qui incombe à la famille va bien au delà du logement avec par exemple l’obligation alimentaire. Il y avait donc bien une logique à pouvoir cumuler les deux systèmes.

La demi-part fiscale est injuste

La suppression de la demi-part fiscale est pourtant une revendication portée par les syndicats étudiants classés « à gauche ». Dans leur raisonnement, la suppression de cette dernière devrait aider au financement d’une allocation d’autonomie ou d’un pré-salaire étudiant, attribué universellement. En effet, il réside une injustice dans la demi-part fiscale, elle est inversement proportionnelle aux revenus du foyer fiscal : plus on déclare de revenus, plus on économise en proportion, ce qui avantage les foyers les plus riches. En revanche, cela représente tout de même une bouffée d’air pour les classes moyennes, leurs enfants n’étant que très rarement boursiers. Si la droite entend faire la chasse aux niches fiscales des foyers les plus riches, ce n’est pas avec cette mesure qu’elle y arrivera. En effet, pour les hauts revenus, le choix sera vite fait entre une exonération conséquente et une aide au logement qui reste très faible, et qui n’a pas été revalorisée depuis 1994. Au final c’est l’étudiant qui sera perdant au profit de la famille, puisque l’aide au logement est versé directement à l’étudiant (parfois au propriétaire, au choix du bénéficiaire) et non pas à la famille.

Quelle logique à cela ?

Essayons de suivre le raisonnement de la droite dans cette affaire. Choisir entre l’aide au logement et la demi-part fiscale revient à suggérer que, si l’étudiant a son propre logement et vie de manière autonome, il doit faire sa propre déclaration d’impôt. C’est déjà le cas de nombreux étudiants qui font leur propre déclaration d’impôts et souvent financent eux-même leurs études. Dans ce cas précis, et si les parents ne versent pas de pension alimentaire, l’étudiant étant à la fois autonome et également indépendant, il peut alors prétendre recevoir du CROUS une aide annuelle du FNAU (Fonds National d’Aide d’Urgence) pour « indépendance avérée », calculée sur les revenus propres de l’étudiant, qui débouche sur l’équivalent d’une bourse : échelon 4 de base (3401 euros par an) ou échelon 6 s’il est boursier sur les revenus de ses parents (4140 euros par an). C’est-à-dire qu’implicitement, on présume qu’un étudiant qui pourtant doit justifier d’être autonome et indépendant de ses parents, sera tout de même aidé par sa famille. A quoi bon alors justifier d’être indépendant si au final les revenus des parents restent un critère discriminant ?

La droite ne va pas jusqu’au bout de la logique

Poussons la réflexion plus loin. Si l’étudiant qui a un logement, doit choisir entre la demi-part fiscale pour ses parents ou l’aide au logement, cela revient à dire qu’il doit choisir entre être à la charge de ses parents, ou bien être indépendant et être à la charge de l’État. Si tel est le cas, cet étudiant dont les parents ne bénéficient pas de la demi-part fiscale et qui fait sa propre déclaration d’impôts, devrait alors se voir calculer son droit à bourse sur ses revenus propres, c’est-à-dire ce qu’il déclare au fisc. Pourtant, même lorsque l’étudiant fait sa propre déclaration, le CROUS calcule toujours le droit à bourse en fonction des revenus des parents. Si cela n’était pas le cas, tous les étudiants qui se déclarent indépendamment de leurs parents devraient pouvoir percevoir une bourse échelon maximum s’ils n’ont pas de revenus, ce qui engendrerait une dépense importante. Ceci reviendrait à considérer l’étudiant comme un adulte, autonome et indépendant. Mais monsieur Baroin dans cette histoire ne va pas aussi loin et s’arrête juste à l’économie mesquine qu’il compte opérer sur le dos des étudiants.

Des étudiants pourtant précaires

Le seuil de pauvreté en 2007 correspondant à 50% du salaire médian en France est de 757 euros par mois. Il y a une grande majorité d’étudiant en dessous du seuil de pauvreté. Plus d’un étudiant sur deux est obligé de se salarier à un moment donné dans l’année pour financer ses études. Le nombre de demandes d’aides d’urgence dans les CROUS explose. C’est dans ce contexte de précarité chez les étudiants que le ministre du Budget compte pressurer davantage ces derniers. En parallèle, la création d’un 10ème mois de bourse (9 mois actuellement) est en discussion avec la ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, pour une dépense supplémentaire d’environ 160 millions d’euros. L’économie qu’espère faire monsieur Baroin est estimé à 1 milliard d’euros. Ce qui pourrait être donné d’un côté est aussitôt repris de l’autre, avec une rallonge de quelques 840 millions d’euros.

Le logement est en crise

Par ailleurs, le logement étudiant est loin d’être au beau fixe. La crise du logement aidant, l’offre étant faible, les prix flambent. Au-delà des prix, c’est aussi l’état des logements qui laissent à désirer. Beaucoup d’étudiants acceptent des taudis pour faire des économies dans leur maigre budget. Et le logement public n’est pas à la hauteur des besoins. Les CROUS, qui possèdent le plus gros parc de logements étudiants, ne logent que 7% des étudiants : 159 000 chambres pour 2,2 millions d’étudiants. Et encore, dans un rapport du Sénat de 2003 sur le logement universitaire, le constat est fait qu’un tiers des chambres sont des « taudis dangereux ». Des étudiants de la métropole Lilloise ont à ce titre durant l’hiver mis en place une grève des loyers en cité-U pour protester contre les conditions de vie indécentes, les hausses de loyer et la hausse du prix du ticket de Resto-U. Ce mouvement a débouché sur une petite dotation supplémentaire de 400 000 euros pour la « mise en décence ». Cette nouvelle attaque de la droite concernant les aides au logement ne fait que remettre de l’huile sur le feu.

Toujours les mêmes qui dépensent … toujours les mêmes qui payent !

Le ministre du Budget espère faire 1 milliard d’économie avec cette mesure. Une goutte d’eau par rapport aux 40 milliards d’économie totale, un ras-de-marée pour le budget des étudiants et des familles. C’est à une droite cynique, capable de demander toujours plus à ceux qui n’ont rien, à laquelle nous devons faire face. Un gouvernement de Front de Gauche aurait fait le choix de faire payer les spéculateurs et autres fauteurs de crise, plutôt que les étudiants. A cela, il faut opposer la mise en place d’un statut social étudiant, lui garantissant son autonomie et son indépendance, afin de faire des études dans de bonnes conditions, et d’atteindre un haut niveau de qualification pour notre pays. Mettre les étudiants en situation de sécurité sociale, c’est investir sur l’avenir.

Une pensée sur “François Baroin fait payer les étudiants pour une crise qui n’est pas la leur !

  • 11/07/2010 à 11 h 30 min
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    cette analyse pose finalement la question de la laïcité et du recul de nos libertés, à quand un vrai statut étudiant avec un salaire minimum pour une vie décente, il faut donner les moyens au jeunes d’apprendre sans les obligations ou la dépendance financière des parents, cela va encore plus accentuer la précarité des jeunes logement insalubre, prostitution pour payer les etudes, resto du coeur….

    la droite et les ministres voyous balayent d’un revers les acquis sociaux et fiscaux y en a marre !!!
    c’est toujours sur les memes que l’on tape.

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